Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy

Monsieur le président de la république,

 

Des salariés de  TDF (autrefois Télédiffusion de France) souhaitent attirer votre attention sur l’avenir de cette entreprise.

 

Sous la direction de Michel Combes, qui a opportunément rejoint depuis Vodafone, TDF a subi un second rachat en LBO construit autour d’un business plan irréaliste, avec entre autres, la prévision  de relais de croissance sans modèle économique défini et l’hypothèse hasardeuse  d'un arrêt de la télévision analogique décalé de deux à trois ans, ce malgré des indications non équivoques du gouvernement et du CSA.

 

Le résultat a été alors une large surévaluation du prix de l’entreprise, avec à la clef un endettement aujourd’hui pharaonique de 3.8 Milliards d’euros de la holding de tête, soit dit en passant immatriculée au Luxembourg. Il est au demeurant surprenant que la CDC ait pu cautionner un tel montage.

 

L’entreprise TDF SAS va bien. Même si tous les relais de croissance (TMP et Radio Numérique) n’ont pas été au rendez–vous, les perspectives d’activité sont bonnes, notamment avec le déploiement à venir de la quatrième licence mobile.

TDF ne souffre en aucun cas d’une adaptation tardive à la fin de l’analogique.

L’entreprise a été le moteur de cette transformation ces dix dernières années, les techniciens et ingénieurs de TDF sont en pointe dans ces domaines.

L’activité résiduelle de l’entretien des émetteurs analogiques n’occupe aujourd’hui que très peu d’emplois. De plus, la décroissance des effectifs  de plus de 1000 salariés depuis 2001 conjuguée à des prestations nouvelles dans la téléphonie mobile et les transmissions régaliennes ont largement amélioré la productivité et placé le groupe TDF  parmi les entreprises les plus efficaces et avancées dans le développement  et le déploiement des  technologies numériques.

 

La raison pour laquelle la direction de TDF, à l’initiative de  Patrick Babin, a tenté de justifier un plan de licenciement d’un quart des effectifs ne tient pas face à l’activité actuelle et future,  notamment les déploiements de la TNT, de la RNT et des Télécoms.

 

Le but non avoué  est la réalisation d’une plus value à court terme par l’amélioration artificielle des ratios financiers, au détriment des emplois.

Hélas, nous devons le constater avec tristesse, cette conduite est manifestement  dictée par des intérêts personnels. En effet, certains de nos dirigeants possèdent, par les jeux d’intéressement liés aux montages LBO, des actions de la holding pour des montants qui excèdent parfois le million d’euros. De tels enjeux ne rendent pas lucide.

 

Du fait de la crise, il est aujourd’hui infiniment peu probable que la vente chimérique imaginée à court terme  par nos actionnaires puisse avoir lieu avec les gains escomptés.

Près de 30 % des LBO en France négocient une réduction de leurs créances devant les tribunaux de commerce. Plus d’un million d’emplois sont en danger dont 550  chez TDF.

La situation financière des fonds d'investissement américains tels que TPG est appelée à empirer encore. Cela pourrait l'amener à des actions de sauve-qui-peut telles que de démanteler l'entreprise. Le débarquement de Patrick Babin et la nomination de Patrick Puy en DGA chargé des affaires sociales ce jour (7/12/2009) est la démonstration éclatante de la déraison des actionnaires et de leur désarroi stratégique.

 

 

Le contexte économique actuel impose donc un changement de stratégie pour TDF.

Continuer dans la voie actuelle  conduira à une catastrophe, car l’entreprise atrophiée par la réalisation du plan « cap numérique » sera incapable d’assurer les défis de l’avenir et même correctement le quotidien. La mise en place de l’organisation « cap numérique » est largement contestée en interne, y compris par de nombreux cadres supérieurs.

 

Ce sont nos concitoyens  qui seront impactés d’ici un à deux ans, par des pannes à répétition sur les réseaux de radio, télévision, les réseaux du ministère de l’intérieur, des pompiers, de la sécurité civile, de la téléphonie mobile, par cette cécité irresponsable.

 

Par ailleurs, l’actionnaire principal américain TPG (Texas Pacific Group) a des intérêts stratégiques plus proches de son pays d’origine que de ceux de la nation française et ses méthodes ne concourent pas au développement des entreprises et des intérêts des états, voir à ce titre, récemment, l’affaire Myer où David Bonderman, PDG de TPG a escroqué l’état  australien, et puis le triste exemple de Gemplus en France.

 

Nous vous laissons  imaginer les conséquences d’importants dysfonctionnements sur des réseaux vitaux pour la nation, alors même que vous aurez été clairement informé de ce risque.

 

Il n’est cependant pas trop tard et nous suggérons  que soit tenue rapidement une table ronde où siégeront la direction, les actionnaires, les banques, les syndicats et les pouvoirs publics, ou toute démarche organisée par le gouvernement permettant de sortir par le haut de cette crise.

 

Une solution devra être trouvée afin d’assurer le fonctionnement pérenne de l’entreprise, sans suppressions d’emplois, avec une vision long terme de son développement.

Nous suggérons à cette fin une sortie honorable de ce montage LBO et une reprise par le FSI (qui  détient déjà 24% de TDF) d’une majorité des capitaux de TDF, avec le cas échéant une augmentation de capital. Pour la France, c’est une des seules solutions sérieuses possibles en dehors d’une nationalisation.

 

Monsieur le Président de la république, nous savons pouvoir compter sur vous pour que la France ne prenne pas un retard préjudiciable dans le développement des technologies numériques hertziennes à cause des errements de quelques financiers avides au détriment de la collectivité et de la nation. Il faut anticiper cette crise pendant qu’il en est encore temps, sans à priori idéologique et avec pragmatisme. Une partie des actionnaires envisage de mettre un PSE en place après le refus des syndicats de signer le PDV, ceci dés la mi décembre. Les risques d’un conflit social très dur avec coupures d’émetteurs TV et radio est très important et il est désormais de votre devoir d’agir, dans l’intérêt national. En ces temps où vous réfléchissez sur  le problème de l’identité nationale, il serait bon et nécessaire d’affirmer cette dernière dans  un domaine aussi sensible.

 

Veuillez agréer Monsieur le Président de la république, l’expression de nos sentiments respectueux et républicains.

 

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